Article de Parenthèse publié le 14 mai 2019, dans la catégorie Cause juridique
La Cour suprême du Canada a accepté, le 11 avril dernier, d’être saisie de l’appel de la décision de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique en matière d’éducation en langue française dans la province. Puis, le 13 mai, elle a annoncé qu'elle entendrait cet appel le 26 septembre 2019.
La plus haute instance au pays répondait ainsi positivement à la demande d’autorisation d’appel déposée par le Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique (CSF), la Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique et des parents co-appelants.
Les problèmes qui sont au cœur de cette affaire – notamment en matière d’immobilisations et de sous-financement du transport scolaire – ont pour effet d’aggraver l’assimilation dans la province. Ces problèmes incitent en effet bon nombre de parents à choisir, pour leurs enfants, les écoles de langue anglaise plutôt que celles de langue française. Malheureusement, la recherche démontre que de tels choix nuisent à la transmission de la langue française et de la culture francophone aux enfants vivant en milieu minoritaire.
La Cour suprême du Canada a accepté d’être saisie de cette affaire qui soulève des questions d’intérêt public et national, notamment :
- L’équivalence réelle : La Cour suprême de la Colombie-Britannique et la Cour d’appel concluent erronément que l’on détermine si l’équivalence est atteinte entre une école du CSF et les écoles de langue anglaise ou d’immersion en comparant des écoles ayant des effectifs similaires et des immeubles dont la capacité est similaire, voire identique. Une telle analyse désavantagera presque toujours la communauté linguistique en situation minoritaire. Les tribunaux de la Colombie-Britannique s’intéressent à la « proportionnalité » entre les édifices scolaires; ce faisant, ils font violence au critère d’« équivalence réelle » énoncé par la Cour suprême du Canada.
- L’article premier de la Charte canadienne des droits et libertés (Charte): L’appel devant la Cour d’appel de la Colombie-Britannique remettait en question la conclusion de la juge Russell voulant que l’article premier de la Charte puisse être invoqué avec succès par une Province, peu importe ses moyens financiers. Selon la Cour d’appel, fournir aux francophones les édifices scolaires auxquels ils ont droit coûterait trop cher. Voilà non seulement la première fois qu’une cour d’appel tire une telle conclusion, mais jusqu’à maintenant et sauf exception, ce ne sont que les crises financières qui ont mené la Cour suprême du Canada à « justifier » une enfreinte aux droits garantis par la Charte.
- Les dommages-intérêts pour une violation de la Charte: La juge de procès conclut qu’en raison d’une décennie de sous-financement structurel en matière de transport scolaire, la Province doit maintenant corriger cette enfreinte constitutionnelle en payant 6 millions de dollars en dommages-intérêts. Les juges de la Cour d’appel ont rejeté cette conclusion. Selon les critères énoncés par la Cour d’appel, bien plus rares seraient les situations justifiant l’ordonnance de dommages-intérêts au bénéfice de ceux dont les droits garantis par la Charte ont été brimés.
Rappelons que de nombreux gains avaient été réalisés devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans la cause sur l’éducation en langue française, incluant la création d’une enveloppe de financement pour les immobilisations réservée aux écoles de langue française. Ces gains demeureront intacts, peu importe la décision de la Cour suprême du Canada..
Une audience qui aura lieu, exceptionnellement, hors de la capitale nationale
Le 13 mai dernier, il a été annoncé que l'appel portant sur l'éducation en français en Colombie-Britannique serait entendu le 26 septembre 2019.
Soulignons que ce sera la première fois que le plus haut tribunal du Canada siégera à l'extérieur d'Ottawa. Les juges se rendront en effet à Winnipeg, au Manitoba. Selon le juge en chef Richard Wagner, il s'agit d'une initiative qui fait partie de l'engagement de la Cour suprême du Canada envers l'accès à la justice, et cette visite lui permettra d'aller à la rencontre des citoyennes et citoyens canadiens d'ailleurs au pays.
«L’appel devant la Cour suprême du Canada vise à contrer les effets de l’assimilation», a affirmé Marie-Pierre Lavoie, présidente du CSF. «Le français est bien vivant à l’extérieur du Québec! Nous existons et nous devons continuer à nous battre pour le respect de nos droits.»
«À l’heure actuelle, on remarque dans certaines provinces, l’émergence de politiques allant à l’encontre de l’intérêt des francophones et des Acadiens, par exemple en Ontario», a souligné Suzana Straus, présidente de la Fédération des parents francophones. «Historiquement, la Cour suprême du Canada est venue en aide aux communautés francophones en situation minoritaire quand ces dernières ont fait face à des décisions de leurs gouvernements provinciaux ne respectant pas les droits des francophones – et c’est ce que nous espérons pour les Franco-colombiens», ajoute-t-elle.
L’audience du 26 septembre durera moins qu'un jour. Les juges de la Cour suprême du Canada rendront leur décision par la suite. Il s’agira d’une décision finale pour cette cause.
Pour en savoir davantage sur la cause juridique sur l’éducation en français en Colombie-Britannique, visitez le site Web https://causejuridique.csf.bc.ca.
(Article mis à jour le 14 mai 2019)
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